Puerh des mois précédents:

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Le puerh du mois

Mai 2019: Xiaguan Te Ji Tuo Cha 2005

Le puerh du mois, une autre manière de découvrir la diversité des thés puerh!



En collaboration avec La cave à puerh et Terre des Thés, nous sommes heureux de vous proposer le puerh du mois, un focus bref et mensuel sur un puerh qui nous a particulièrement marqué.

Jeune puerh brut, puerh fermenté, vieux arbres, arbres sauvages, stockage Hong-Kongais, vieux puerh, etc, grâce à l'abonnement proposé sur le site de Terre des Thés, vous pourrez chaque mois et pour seulement 24€ (ports compris), recevoir chez vous le puerh du mois, en quantité variable selon la valeur et la rareté des thés (une petite galette, 50g à 200g de vracs, ou parfois un ou plusieurs échantillon de 10g), et découvrir ainsi progressivement les multiples facette de l'univers du thé puerh!

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Mai 2019: Xiaguan Te Ji Tuo Cha 2005(diaporama)



Le mois dernier, nous vous faisions découvrir un puerh intéressant, produit il y a 15 ans dans un petit atelier inconnu de Yi Wu. Derrière ces feuilles transparaissait la volonté qu’ont eue les Taiwanais à la fin des années 1990 : celui de s’éloigner des thés élaborés par les fabriques du Yunnan et de l’héritage des usines d’État, pour tenter de reproduire des puerh à l’image des grandes galettes historiques du passé.

Pour prendre le contre-pied de ce thé, nous vous proposons ce mois-ci un puerh conçu au même moment, en 2006, dans une des grandes usines d’État du Yunnan, à savoir Xiaguan. Les usines d’État chinoises, (telles que Menghai Tea Factory, Kunming Tea Factory, Fengqing Tea Factory ou encore Xiaguan Tea Factory) sont particulièrement importantes dans l’histoire du thé, car c’est de leurs portes que sont sortis la quasi-totalité des puerh produits entre 1950 et 1995. Lorsque la Chine devient communiste en 1949, la production du thé est en effet confiée à un nombre limité d’usines, seules autorisées à confectionner et vendre, sous le contrôle d’une entreprise d’État « China National Native Produce & animal by-products import & export corporation » (généralement abrégé en CNNP dans le milieu du thé).

Pendant près de 50 ans, ces fabriques ont donc progressivement façonné le visage du puerh moderne. C’est notamment au sein de ces usines qu’ont été développées les recettes classiques telle que la 7542 (voir puerh des mois de novembre et décembre 2016), ou encore le shu cha, ou puerh fermenté moderne. Il est ressorti de ces années un caractère, celui des « Chi Tse Beeng Cha » (dénomination qu’on trouve encore sur de nombreuses galettes) : des thés qui s’éloignaient de ce qui était produit pendant la première moitié du 20è siècle et qui seront la norme jusqu’à l’ouverture du marché à la fin des années 1990. Ce sont en grande partie grâce à ce « goût » des fabriques d’État, et à la manière dont il évolue avec le temps que l’on doit l’engouement soudain pour cette famille de thé.

Si un certain nombre de traits gustatifs communs se retrouvent dans les productions de cette période et définissent le « style Chi Tse Beeng », les thés sortis de ces différentes usines ne sont pas les mêmes pour autant. Au contraire, chaque fabrique possédait alors sa propre approche, son propre style et un « goût » qui lui était personnel. Jusqu’aux années 2000, l’amateur de puerh pouvait ainsi à la première gorgée reconnaître s’il s’agissait d’un thé produit par exemple par Xiaguan, Kunming ou Menghai Tea Factory. C’est d’ailleurs probablement là (c’est-à-dire dans l’approche et le style singulier que chaque fabrique a progressivement posé) que se trouve un des plus grands intérêts de cette ère des producteurs d’État.

C’est d’autant plus intéressant aujourd’hui, où nous observons une explosion du nombre de producteurs de puerh, désormais libérés des normes des usines d’État, mais où paradoxalement les goûts ont tendance à se standardiser, chaque producteur cherchant avant tout à coller au marché et aux goûts du moment…

La fabrique de Xiaguan, qui a produit le thé que vous avez en main est donc, avec Menghai Tea Factory, une des plus vieilles usines du Yunnan. Originellement appelée Kangzang, elle fut fondée en 1939 dans la ville de Xiaguan (plus connue sous le nom de sa vieille ville : Dali). Nationalisée en 1950 avec l’arrivée des communistes, l’usine devient Yunnan Province Xiaguan Tea Factory, pour être renommée Yunnan Xiaguan Tea Factory Tuocha Company Limited en 1994.

Active depuis près de 80 ans, Xiaguan a produit sous différentes marques de nombreux thés qui ont marqué l’histoire du puerh. Plusieurs sont typiques de Xiaguan, en particulier ses tie bing (galettes aux bords plats, compressées très fortement dans des moules métalliques), ses jincha vendus sous la marque Bao Yan (puerh compressé en forme de champignon à l’aide d’un linge, pour l’export vers le Tibet et dont nous vous avions présenté un exemple en avril 2017). Mais plus que tout, cette fabrique est connue pour ses tuo cha, ces thés compressés en forme de nid, dont Xiaguan a fait sa spécialité.

Parmi les nombreux tuo cha que Xiaguan a conçu, le plus connu en occident est sans aucun doute le « thé tuocha », ce nid de puerh fermenté emballé dans une boite verte typique (que certains d’entre vous ont dû voir débarquer dans les épiceries chinoises dès les années 1980). Or c’est bien Xiaguan qui avait produit ce thé, spécialement pour le marché français, à tel point qu’on les surnomme en Chine les « Xiao Fa » pour petit Français ! Si la qualité de tels thés d’épicerie est naturellement adaptée à une consommation courante, d’autre tuo Xiaguan plus haut-de-gamme sont bien plus intéressants et recherchés des amateurs, en particulier lorsqu’ils ne sont pas fermentés à la production (sheng cha ou puerh brut) et ont vieilli progressivement avec le temps, comme le thé de ce mois-ci. Sorti de la fabrique de Xiaguan en 2006, il s’agit d’un grade supérieur (Te Ji), qui a ensuite été stocké de manière naturelle sèche à Taiwan.

Les puerh bruts de Xiaguan, et notamment des grades supérieurs, sont connus pour être puissants, secs et tanniques. Ce sont des thés qui possèdent une certaine austérité qu’il faudra au moins 10 ans pour assouplir et qui sont donc adaptés à des gardes longues de plusieurs décennies, ou à un affinage tel qu’on en pratique à Hong-Kong. Ils développent alors un caractère puissant et particulièrement boisé, sculpté par la maturation sans être fondu pour autant.

Dégustation

Ce thé peut aussi bien être infusé dans une petite théière qu’à l’aide d’un gaiwan. Cependant, et à moins que vous soyez habitué aux thés charpentés et tanniques tels qu’on en produisait jusqu’à la fin des années 1990, nous vous conseillons plutôt le gaiwan pour un premier contact. Utilisez de préférence une eau pleinement bouillante. Employer une eau plus tempérée pourra rendre l’infusion plus douce, cependant le caractère de ce thé tenant notamment dans son aspect charpenté, vous passeriez à côté de ce qui fait sa richesse et sa typicité. C’est pourquoi nous vous conseillons plutôt de réduire les durées d’infusion (jusqu’à une infusion flash de moins d’une seconde si besoin) si vous voulez le rendre plus doux.

Boire la première infusion (qu’on jette parfois et qui est particulièrement douce) est intéressant, car elle permet de juger le caractère aromatique du thé, indépendamment de sa charpente. Commencez par des infusions courtes, de 2 à 5 secondes, que vous pourrez ensuite adapter selon vos propres goûts, en allongeant par exemple les durées pour obtenir un résultat plus sec et dense.

Après quelques tasses, on se retrouve plongé dans le charme typique et inimitable des thés de Xiaguan : Un nez dominé par du bois sec, qui rappelle le pin, sans fioriture, mais franc, qui avec les années a développé la fraîcheur camphrée typique d’un puerh vieilli. En bouche (et dans la gorge), c’est charpenté, franc et puissant au premier abord, avant que se développent en échos ces douceurs complexes et persistantes que les Chinois appellent « Hui Gan ».

Pour ceux d’entre vous qui ont encore du thé du mois dernier (Yi Wu commande Taiwanaise 2005), il est intéressant de les comparer. Bien qu’au premier abord les deux thés se retrouvent dans un univers boisé de puerh vieilli, leurs caractères sont bien différents. Après avoir bu le Xiaguan 2006, le thé de Yi Wu devrait vous sembler bien moins sec, plus souple et charnu, mais aussi beaucoup plus porté sur la dimension aromatique, avec des notes de fleuri, fruité et d’intenses touches de vanille, qui deviennent flagrantes dans la comparaison.

Maturation

Il s’agit d’un thé de garde, à la maturation particulièrement lente, qui mettra plusieurs décennies à atteindre son apogée. Avec presque quinze ans de maturation naturelle, il a cependant déjà développé un très beau profil boisé, fidèle à ce qu’on attend d’un Xiaguan de 10 ans d’âge, et il peut très bien être apprécié ainsi. Si vous préférez le laisser vieillir nous vous suggérons, comme tout puerh, de le stocker dans une atmosphère exempte de toute odeur, à l’abri des rayons directs du soleil, et occasionnellement aérée.

Ce thé fait désormais partie de La Cave à Puerh et est disponibles à la vente ici:
https://www.terre-des-thes.fr/boutique/xiaguan-te-ji-tuocha/