Vous avez sûrement déjà croisé, sur les étales de vendeurs ou sur Internet, des galettes de puerh (Pu Er tea) vendues comme red mark, red label, blue mark, blue label, yellow mark, yellow label, green mark, green label, avec tout un tas de variantes qui donnent au nom du thé une touche très « jargon d’expert», comme big red mark, small yellow label, big blue mark, yellow mark huit caractères, green mark caractères simplifiés, etc, on pourrait remplir des pages d'exemples de ce type.
- 1.Exemples de thés vendu comme Red Mark sur l Internet Chinois
- 2.Exemple de galette vendue comme Marque Verte
- 3.Différentes Chi Tse Beeng colorées
- 4.Thés vendu comme Marques Jaunes
Il s'agit généralement de puerh (Pu Er tea) bon marché, verts ou fermentés, produits après les années 1990 et dont les emballages rappellent plus ou moins ceux qu'on trouve dans les livres de collectionneurs. D’emblée celui qui découvre le monde du puerh (Pu Er tea) se dit que tout cela doit avoir un sens, que ces thés sont des références connues, qu’il doit y avoir quelque chose qui lie ensemble les différentes « marques vertes » ou « marques rouges » et que derrière ces galettes il y'a un monde complexe à comprendre et à explorer…
Nous allons pourtant voir qu'il n'en est rien. Contrairement aux apparences, et à moins que vous ayez passé par inadvertance la porte d'une boutique de collectionneur Hong-Kongais où les galettes commencent à quelques milliers d’Euros, ces thés n’ont finalement ni beaucoup de sens, ni grand intéret, et leurs noms sont en réalité utilisés complètement arbitrairement, sans aucun rapport avec la nature du thé qu’ils décrivent...
D’où viennent ces noms étranges ?
D'où viennent alors ces noms, qui ne figurent pas sur les emballages (pas même en chinois) et que tant de vendeurs aiment utiliser pour désigner leurs produits ?
Ces appellations, précises et unanimement reconnues des amateurs de vieux thés, figurent bien dans tous les livres sérieux sur les puerh (Pu Er tea) anciens, et désignent dans le jargon des collectionneurs un certain nombre de galettes connues. Mais celles-ci ont été strictement produites il y’a plus de 40 ans, durant l'ère des Yin Ji Cha (parfois aussi appelée ère des Masterpiece en anglais), c'est à dire entre le début des années 50 et le début des années 70, soit avant l’apparition des « Chi Tse Beeng Cha » (appellation qui ne peut donc pas figurer sur une Red Mark, Blue Mark ou Green Mark).
Seules exceptions à cela est peut être, la Marque Orange, qui est un thé de 1996, que les vendeurs ont depuis sa production appelé ainsi, et qui est rentré dans le jargon, ou les Marque Bleu aquatique, qui sont des thés découverts dans les années 1990, dont les noms ne représentent pas d’ambiguité (puisque aucun autre thé ne s’appelait ainsi avant), et pour lesquels tout le monde est d'accord qu’ils n'ont rien à voire avec les autres « marques » de l'ère des Yin Ji Cha.
Le nom donné à cette période (1950-1970) de l’histoire du puerh, « Yin Ji Cha », se réfère quadn à lui aux appellations qui ont étés donné à ces thés: Hong Yin (Marque Rouge), Lan Yin (Marque Bleue), Lu Yin (Marque Verte), Huang Yin (Marque Jaune), et qui finissent toutes par « Yin » (Marque ou trace).
Ces nom, précis et reconnu de tous les collectionneurs depuis plus de 20 ans ne devraient donc être utilisés que pour désigner les thés auquels ils se réfèrent. Les employer aujourd’hui pour d'autres productions, en particulier pour des thés contemporain n'a aucun sens, si ce n'est celui d'escroquer le débutant.
- 1.Véritable Marque Rouge des années 1950
- 2.Copie de Red Mark vendue comme années 2000
- 3.Thés vendu comme Marque Rouge sur Internet chinois
- 4.Contrefaçon récente de Marque Rouges
Les Hong Yin, Marques Rouges en Français, Red Mark ou Red Label en anglais (ou Red Mark Round Tea Cake dans la version longue), désignent ainsi les premières galettes produites par les usines d'état entre les années 1950 et les années 1960. Ces galettes sont de loin les plus connues et recherchées du monde du puerh, et sont aussi parmi les plus chères du marché (compter quelques dizaines de milliers d’Euro la galette). Les Marques Rouges ayant été produites pendant plus de 10 ans, les collectionneurs distinguent différentes Marques Rouges en fonction de leur période de production (Marque Rouge caractères larges, moyen ou extra fin, etc...)
- 1.Véritable Marque Bleue
- 3.Contrefaçon de Marque Bleue
- 4.Galettes vendu comme Marque Bleue sur Internet Chinois
Les Lan Yin, Marques Bleue en Français, Blue Mark ou Blue Label en anglais (ou Blue Mark Round Tea Cake dans la version longue) sont des thés qui ont étés produits entre le milieu des années 1950 et le milieu des années 1960. Leur emballage mais surtout leur recette diffère des Marques Rouges (et sont notamment reconnues pour être produites avec du thé de Menghai, là où le matériel des Marques Rouges viendrait exclusivement de Mengla) ce qui leur donne un caractère bien différent. Plusieurs séries de Marques Bleues existent tel que les Marques Bleue grade A et grade B, Marque Bleue version pèche ou vermillon, etc...
- 1.Véritable Marque Verte
- 2.Thé vendu comme Marque Verte
- 3.Copie de Chi Tse Beeng vendu comme Marque Verte
- 4.Thés vendu comme Marque Verte sur Internet chinois
Les Lu Yin, Marques Vertes en Français, Green Mark ou Green Label en anglais (ou Blue Mark Song Character dans son appellation exacte) désignent des thés produits entre le milieu des années 1950 et le milieu des années 1960. Les Marques Vertes regroupent elles aussi différents thés (Marque Verte galette et disque, Marque Verte typo artistique, etc).
Les Huang Yin, Marques Jaunes en Français, Yellow Mark ou Yellow Label en anglais, désignent enfin plusieurs séries de galettes et de disques produites entre la fin des années 1960 et les années 1970. Ces puerh (Pu Er tea) sont les derniers thés de l'ère des Yin Ji Cha, et pour les dernières production des années 1970 (aussi appelé Yellow Mark Chi Tse Beeng) annoncent l'ère des Chi Tse Beeng Cha. Comme pour les autres Yin Ji Cha, la famille des Marques Jaunes comprend un certain nombre de thés, reconnaissable par leur forme, leur emballage ou leur caractère gustatif particulier (Marque Jaune galette et disque, grande Marque Jaune, petite Marque Jaune, Marque Jaune caractère vert, Marque Jaune Chi Tse Beeng, Marque Jaune « avec prescription consciencieuse », Marque Jaune typo artistique, etc.). La Marque Orange enfin, fait exception, et est un thé précis produit en 1996, qui ne fait pas partie à proprement parler de l’ère des Yin Ji Cha..
Pourquoi ces noms, et que signifient-ils?
Mais pourquoi donc tous ces nom étranges et d'où viennent ils ? Ces appellations viennent du jargon des collectionneurs et des amateurs et ont été donnés a un certain nombre de thés anciens, produit entre les années 1950 et les années 1970. Bien que ce jargon soit très précis, répertorié dans de nombreux ouvrages et reconnu de tous, et que ces appellation sont donc sans équivoque, il ne s'agit pas des nom « officiel » sous lesquels ces thés ont étés commercialisés, mais bien des noms qui ont été donnés après coup pour désigner ces thés, et ils ne figurent donc naturellement sur aucun emballage.
Pour comprendre la nécessité que les amateurs et collectionneurs ont eut à « coller » de tels noms sur un certain nombre de galettes, il faut se rappeler que du temps des usines d'état (1950-1995) les thés ne possédaient pas de noms permettant de les différencier. Pire encore il n’y avait pas avant les années 1970 de numéro de série ou de recette identifiable, ni aucune indication quand à la date de production.
Lorsque les premiers emballages papier individuels de galettes apparaissent dans les années 1950 (avant on se contentait d'emballer 7 galettes ensemble dans des feuilles de bambou, sans autre emballage) on les imprima naturellement en rouge, à la couleur du parti qui venait de s'imposer en Chine et de s’octroyer l’exclusivité de la production et de la vente du thé. Au centre de la galette on place un gros caractère thé (茶), entouré de huit caractères Zhong (中, comme Zhong Guo, la Chine ou littéralement le pays du milieu), et qui deviendra le logo de Zhong Cha (中茶), marque d’état sous laquelle tous les puerh (Pu Er tea) furent commercialisés jusqu’au années 1990. Sur la circonférence on se contente d’inscrire « Entreprise de thé de Chine, Branche du Yunnan » (中國茶業公司雲南省公司) et « Thé rond du Yunnan » (中茶牌圓茶), nom qui désignait les galettes de thé avant l’ère des Chi Tse Beeng, où le thé rond (Yuan Cha) fut remplacé par galette de thé (Bing Cha). C'est ce même emballage qui fut utilisé pendant 10 ans, quelque soit donc les thés, leur qualité ou leur année de production.
Plus tard furent introduites deux nouvelles recettes de qualités différentes, et pour cela deux nouveaux emballages sur lesquels figuraient le grade du thé, mais face à l'échec commercial de ces nouveaux produits cette idée fut vite balayée. Pour cependant ne pas gâcher les emballages déjà imprimés (on est il faut le rappeler en pleine ère communiste) on se contenta de cacher les indications de grade derrière une grosse tache rectangulaire d'encre bleue (qui deviendra partiellement translucide avec le temps) et ces emballages furent utilisés pour un autre thé jusqu’à épuisement du stock. Une fois tous les emballages écoulés, de nouveaux papiers furent ré-imprimés, sans les notions de grade cette fois, et bien sur sans tache bleue !
- 1.Emballage d une Marque Bleue
- 2.Tache bleue sur une Marque Bleue
- 3.Marque Verte
- 4.Infusion d une Marque Rouge
Parmi ces ré-impression, qu'on tirera régulièrement pendant 20 ans, il y'a des lots, surtout tardif, dont la qualité de l'encre verte laissait à désirer et dont la couleur virera au jaune avec le temps… A plusieurs reprises, furent aussi expérimentés de menu changements, notamment au niveau des typographies (la fameuse série « typo artistique » par exemple) pour tenter de toucher d'autres marchés ou essayer de renouveler l'image de ce produit, en particulier pour l’export.
Les années 1970 marquèrent ensuite un grand tournant dans l’histoire du puerh. Différents changement prennent place dans la manière dont les thés sont produits et assemblés. L’appellation «Chi Tse Beeng Cha » (云南七子饼茶, ou Sept galettes du Yunnan) vient remplacer l’ancienne appellation « Yuan Cha » (中茶牌圓茶 , ou Thé rond du Yunnan) et figure désormais sur la circonférence des galettes. Peu de temps après une transcription du chinois en caractères romains s’invite lui aussi sur les emballages.
Lorsqu'on redécouvre la valeur du puerh, dans les année 1980 mais surtout 1990, et que les galettes produites avant les années 1970 commencent à sortir des stock des maisons de thé Hong-Kongaise, les amateurs et collectionneurs se retrouvent devant une multitude de galettes, dont les emballages semblent au premier abord tous identiques, mais qui renferment des thés produits sur une période de près de 40 ans, à la nature et aux caractères bien différents!
Un jargon commence donc à prendre forme pour désigner ces thés. Les galettes intégralement imprimées de rouge sont naturellement appelées « Marques Rouges » (Marque est à prendre comme « marque distinctive » ou « trace » et non comme « marque déposée » ou Trademark), celles présentant une grosse tache bleue (pour masquer l'indication du grade) se font appeler « Marques bleue », celles dont le caractère « thé » est imprimé en vert (et qui remplacent les emballages à la tache bleue) sont désignées comme « Marques vertes », celles dont le vert à viré au jaune sont appelées « Marques Jaunes », etc.
Petit à petit le jargon se complexifie. On note par exemple que les matrices en bois utilisées pour imprimer les emballages des Marques Rouges se sont usées avec le temps et ont eux tendance à s'affiner, et que donc la largeur des caractères est un indicateur de l'âge du thé (apparaissent ainsi les notions de marques rouges caractères larges, fin, extra fin, etc), on encore l'existence de certaines séries repérables par des détails involontaires de l'emballage (Marque rouge point rouge, « prescription consciencieuse », etc). Enfin des classifications apparaissent en fonction du caractère gustatif du thé, pour définir si thé appartient ou non à telle famille. Ainsi par exemple les marques vertes, font en réalité partie de la plus grande famille des marques bleue, car toutes deux sont basées sur le même assemblage.
Pourquoi réutiliser ces noms plusieurs dizaines d’années après pour désigner d’autres thés n'a donc aucun sens (si ce n’est de tromper le consommateur) ?
Les années 1970 inaugurent de nouvelles approches dans la production du thé et marquent un tournant dans l’histoire du puerh. C’est fin des différentes « Marques colorées », et le début de l'ère des Chi Tse Beeng Cha et des recettes à quatre chiffres (7542, 7572, 8582, etc). Les galettes, désormais toutes appelées « Chi Tse Beeng Cha », affichent un nouveau modèle standard d’emballage, vert (le caractère 茶) et rouge (le reste de la galette), facile à repérer par l’inscription 云南七子饼茶 sur la partie suppérieure, et qui sera utilisé, avec quelques variation, jusqu'aux années 1990.
N'ayant plus de raison d'être identifiés par leur couleur, ces thés sont désormais désignés par leur origine (usine), la recette de l’assemblage et leur âge, informations qui ne figurent pas sur l'emballage des galettes mais qu'on retrouve sur les ticket qui accompagnent les Jian (panier de 84 ou 42 galettes). On parera ainsi d’une 7542 des années 1990, d’une 8582 des années 1980, d’une 7542 Menghai Tea Factory de 1996, etc.
Les années 90 marqueront enfin un tournant décisif dans l'univers du thé puerh : Il s’agit de la fin de la période des usines d'état, et l'ouverture du marché. Dès lors chacun peut librement créer sa propre entreprise de thé, et commercialiser ses propres galettes. Sans surprise une multitude de producteurs voient le jours, et le marché est soudain inondé de produits de tout types, avec des styles et des qualité très variables.
- 1.Exemples de galettes de la nouvelle ère par Mengku Rong Shi
- 2.Nouveaux emballages Menghai Tea Factory des années 2000
- 3.Exemples de galettes de la nouvelle ère par Lan Ting Chun
- 4.Exemples de galettes de la nouvelle ère par Fengqing Cha Chang
Pour se différencier de leurs concurrents, construire leur images et identifier leur différents produits, chaque producteur développe alors sa propres identité visuelle, ses propres emballages, et donne à ses productions des noms ou des références qui lui appartient. Les usines d’état, dont certaines se retrouvent privatisées, suivent d’ailleurs le pas et développent elles aussi une multitude d'emballages, plus modernes, plus chargés, et plus expressif pour leur différents thés.
Parallèlement de nombreuses usines inconnues, mais parfois aussi de véritables usines d’état ou anciennes usines d’état (comme par exemple les héritiers de la marque Zhong Cha) continuent à cloner ou à s'inspirer des emballages communistes du passé en empruntant de manière complètement arbitraire les design et les couleurs utilisées 30 ans avant.
- 1.Copies de Marques Rouges et Marques Bleue produites dans les années 2000
- 2.Grossière copie de Marque Bleue
- 3.Imitations de Chi Tse Beeng Cha vendues comme Marques Vertes
- 4.Imitations de Chi Tse Beeng Cha vendues comme Marques Jaunes
- 5.Thés vendus comme Marque Jaune sur Internet Chinois
Parmi ces thés on trouve de véritables contrefaçons, qui reprennent avec le plus de précision possible les emballage de tel ou tel grand thés du passé. Mais on trouve aussi et surtout une multitude de thés qui ne reprennent que très grossièrement ces emballages classique, en se contentant de faire figurer les mêmes inscriptions (Le logo Zhong Cha au centre de la galette, Yunnan Chi Tse Beeng Cha sur la périférie, etc), sans pour autant respecter strictement les typo ou les tailles d'origines, à l’image de la multitude de sacs «Louis Vuitton », ou de T-Shirt « Chanel », « Dior » ou « Nike » qu’on trouve sur les étales de tous les marchés Chinois et qui dans le fond ne trompent personne. Comme sur ces faux vêtement de marque on trouve d’ailleurs très souvent des « fautes de frappe » sur les emballages de ces galettes, en particulier sur la version anglaise du Nei Piao (petit ticket informatif qui accompagne la galette) qui est parfois truffé d’erreurs.
Or ce sont précisément ces thés, produits récemment et qui n'ont finalement absolument aucun rapport avec des marques rouges, bleues, jaunes ou vertes des années 1950 et 1960 qu'on retrouve régulièrement vendu sur Internet ou dans les boutiques de thé comme étant des Marques ou Label Rouges, Verts, Bleus ou Jaunes. Bien entendu appeler ces galettes de la sorte n'a aucun sens, si ce n'est donner l'impression au néophyte qu'il s'agit de thés classiques ou renommés, là où il n'en est rien.
On notera d’ailleurs que la majorité des galettes vendues comme « Marques Vertes » ne reprennent en réalité pas le design des véritables Marques Vertes, mais sont simplement des copies de « Chi Tse Beeng Cha » récentes, facilement reconnaissable à la présence de caractères occidentaux (YUNNAN CHI TSE BEENG CHA), qui ne figuraient pas sur les emballages des années 1960 ! Le simple fait qu’un caractère 茶 (thé) soit imprimé en vert au centre de la galette, ce qui est le cas de la quasi totalité des thés produits entre les années 1970 et 1995, suffit ainsi à ce que ces thés se retrouvent vendus par certains comme « Marque Verte ».
Les thés vendus comme « Marque Bleue » reprennent quand à eux souvent le design des vieilles « Marques Rouges », imprimés en bleu pour l’occasion, ce qui n’a jamais existé par le passé et ne correspond pas aux « Marques Bleues » originales (dont les emballages ne comportent qu’une tache bleue).
Que sont finalement ces thés aux appellations trompeuses?
Derrière ces emballages on trouve tout et rien : Des puerh (Pu Er tea) brut, des puerh (Pu Er tea) fermentés, des feuilles de tout types, de toutes taille, des thés sockés sec, humides, etc. De plus l'usage de telle ou telle « couleur » étant complètement arbitraire, on ne peut faire aucun lien entre la couleur annoncé et le thé qu'il contient. Inutile donc de spéculer sur le type, le caractère gustatif ou la qualité d’une « marque verte caractère traditionnel» des années 90 face à une galette «petit label jaune » des années 2000, ou « petit schtrumpf bleu clair », ces nom ne donnent finalement pas la moindre indication sur le thé qu’ils désignent. Inutile aussi de demander l’avis à un expert, ou de m’envoyer une photo de votre galette, ces emballages étant standards, et largement utilisés par une multitude de producteurs anonymes, il est totalement impossible de se prononcer sur la nature ou la qualité du thé à partir de son emballage.
- 1.Contrefaçon de Chi Tse Beeng Cha vendue comme Marque Verte
- 2.Contrefaçon de Chi Tse Beeng Cha vendue comme Marque Jaune
- 3.Contrefaçon de Chi Tse Beeng Cha vendue comme Marque Bleue
- 4.Stock de contrefaçon dans une usine spécialisée
- 5.Contrefaçon de Chi Tse Beeng Cha
Il y’a tout d’abord dans ces thés d’authentiques « Chi Tse Beeng Cha », véritablement sorties des usines d’état, dont l’emballage est sans équivoque (c’est écrit Chi Tse Beeng Cha en gros dessus), mais qui pourtant se retrouveront parfois vendues au néophyte comme étant des Marques Vertes. Ces thés, qui n’ont rien à voir avec une Maque Verte peuvent cependant être excellents, mais il est bien de rappeler que les thés véritablement sorties des grandes usines d’Etat avant 2000 sont des thés rares – une goûte au milieux d’un océan de contrefaçons – et désormais chers (comptez au grand minimum plusieurs centaines d’Euros pour une Chi Tse Beeng authentique produite avant 2000, mais on passe vite la barre des 1000 Euros pour des thés plus anciens), et que donc ce ne sont pas des thés qu’ont trouve dans toutes les boutiques.
Au contraire les prétendues « marques colorées » qui inondent le marché et s’adressent au non-connaisseur sont plus généralement des thés très bon marché. Dans la grande majorité des cas leur qualité et très moyenne, les producteurs sérieux préférant en général mettre en avant leur nom, leur image et la spécificité de leurs thés au lieux de les couvrir d’emballages génériques et annonymes. De plus comme en général aucune information ne figure sur ces emballage, toute traçabilié de l'origine, ou de la fabrique ayant produit ces thés est impossible.
Certains producteurs enfin, surtout au début des années 2000, ne se sont inspirés que du « style » général des emballages classiques, qu’ils ont revisité pour y intégrer leur propre nom, et jouer ainsi sur l'aspect classique du thé tout en le revendiquant. Ces thés peuvent être très bons, et n’ont pour leur part rien à voir avec des contrefaçons, tant qu’ils ne se retrouvent pas après coup vendus sous un nom absurde du type « marque rouge/bleu/verte ».
- 1.Galette Menghai Tea Factory qui pourrait aisément être vendre comme Label Rouge
- 2.Galette Mengku Rong Shi qui pourrait aisément être vendre comme Label Verte
- 3.Galette Chang Yun qui pourrait aisément être vendre comme Label Bleu
- 4.Thés vendu comme Marque Bleue sur Internet Chinois
Dans le même ordre d’idée on trouve aussi de nombreux thés produits récemment par des producteurs privés, dont les emballages ne reprennent en rien les thés classiques de l'ère de Yin Ji Cha, mais que certains vendeurs commercialisent tout de même comme « marque verte », « marque bleue », etc, sous prétexte qu'on retrouve par exemple cette couleur quelque part sur l'emballage, ou pour masquer le véritable nom du thé.
Enfin, mais c'est beaucoup plus rare, il existe bien de véritables imitations des « marques » originales, généralement produites dans les années 90 ou avant. Ces thés, rares et beaucoup plus cher (compter quelques centaines d’Euros la galette), sont de vraies copies de faussaires, de l'aspect des feuilles aux détails les plus fins des emballages. Parmis eux ont trouve d'excellents thés, qui n'égalent en rien les originaux de 20 ans plus vieux qu’eux, mais qui sont parfois de très bon puerh (Pu Er tea) de 20 ans d'âge !
Pourquoi ces thés sont ils douteux et pourquoi ils devraient être évités?
Je déconseille de manière générale d'acheter ce type de thé, à moins d’avoir pu le goûter et que sa qualité en vaille la peine (cas d’authentiques Chi Tse Beeng anciennes, ou de véritables contrefaçon fines des années 1980 ou 1990 par exemple). Tout d'abord parce qu'en tentant de tromper l'amateur non expérimenté, ils reflètent de manière évidente un manque de connaissance ou une certaine malhonnêteté du producteur ou du vendeur.
- 1.Nei Piao contrefait dans une usine spécialisée dans les faux
- 2.Contrefaçon de Chi Tse Beeng Cha
- 3.Nei Piao contrefait d une fausse Chi Tse Beeng Cha
Ensuite parce que ces thés ne présentent aucune traçabilité. Impossible de savoir d'où viennent les feuilles qui les composent, dans quelle conditions ils ont été produits, fermentées, stockés, et que dans certains cas cela peut être très douteux. On peut aussi en général émettre de gros doutes sur l’âge prétendus de ces thés, et la multitude de « Marques Vertes » bon marché qu’on trouve en Chine pour quelques Euros seulement et qui se disent avoir été produites dans les années 1990, sont bien souvent des shu cha à peine sorti d’usine...
Enfin et peut être surtout parce que leur qualité laisse souvent grandement à désirer. N'importe quel producteur sérieux préfère mettre en avant son travail, plutôt que de se cacher derrière un emballage standard et anonyme. Au même titre que les contrefaçons de vins, courantes en Chine, ce type de productions sont donc le plus souvent des thés de piètre qualité, commandés en gros à des usines peu scrupuleuses (et souvent spécialisées dans la contrefaçon), pour inonder les marchés, les super marchés chinois et les boutiques de touristes.
On trouve donc généralement des thés de bien meilleur qualité du coté de petits producteurs peu connus mais qui assument leur travail et produisent des thés sous leurs propres noms.
- 1.Etats LATOUR Grand vin de Bordeaux
- 2.Louis vton BORDEAUX
- 3.Publicité Chinoise pour le Chateau Latour Largus
- 4.Magasin de thé pour touriste à Lijiang
- 5.Nei Piao de Chi Tse Beeng grossièrement contrefait
Pour prendre un exemple qui je pense sera parlant, même si vous cherchez un vin de table bon marché pour faire un pique-nique, vous préférerez très probablement vous orienter vers un petit producteur local, plutôt qu’acheter une bouteille douteuse vendue à 5€ comme étant une vin rennomé « ETATS LATOUR GRAND VIN DE BORDEAUX 1992», ou « LOUIS VTON BORDEAUX » (ne riez pas, on trouve couramment ce genre de choses dans les supermarchés chinois!).
Et qu'en est il des Tongqing Hao, Song Pin Hao et autres producteurs antiques qu'on a vu ces derniers temps ré-apparaitre sur le marché ?
Depuis les années 1990, mais encore aujourd’hui, il est courant de voir apparaître des galettes de producteurs inconnus, dont l’emballage reprend (généralement sans aucune autre indication) les logos d’anciens producteurs historiques (qui ont disparus dans les années 1950) tel que Tongqin Hao ou Song Pin Hao.
- 1.Copie de Tongqing Hao sur l internet chinois
- 2.Copie de Songpin Hao sur l internet chinois
- 4.Contrefaçon de Songpin Hao
Comme les « marques de toutes les couleurs » dont nous venons de parler il s’agit naturellement de contrefaçons et de thés génériques (certains dirons « hommage » ou « tribute », mais ce sont des euphémismes), emballés aux couleurs de grand thés historiques pour mieux se vendre ou tromper le débutant. Il n’existe donc pas de véritables Song Pin ou de Tong Qing des années 1990 ou 2000, et un thé vendu comme tel peut être tout et n’importe quoi qui a été emballé au couleur de ces grands noms du passé.
On notera au passage que si ces thés reprennent bien les logos originaux de ces anciens producteurs, ils se retrouvent flanqués sur des emballages en papiers, ce qui est drôle quand on sait que ce type d’emballage individuel est une création des usines d’état et est apparu après la fermeture de ces anciens ateliers privés. Bref découvrir une authentique galette de Song Pin Hao avec un emballage imprimé, c’est un peu comme déterrer une cannette de bière de 1910...
Plus récemment on a aussi vu apparaître sur le marché différentes marques Chinoises, qui reprennent cette fois ci ouvertement les nom et les logos de ces grands producteurs historiques, laissant croire à une certaine continuité avec ces derniers.
C'est le cas de par exemple de la marque Tongqing Hao, récemment arrivée sur le marché, qui affiche fièrement sur ses emballages « since 1736 » et qu'on retrouve désormais bien placé dans de nombreuses boutiques d'aéroports… C’est donc cette fois très officiel et on y croirais presque, si la seule chose qu’avaient fait les propriétaires légaux de ces marques n’avait été de déposer noms et les designs de ces vieux producteurs, qui étaient restés disponibles et non protégés jusque là, aucun descendant de ces familles n'étant vivant.
Car, bien malheureusement il ne reste en réalité guère de trace des grands producteurs historiques d’avant 1950 si ce n'est quelques rares galettes qui ont survécu au temps (voir Song Pin Hao, dégustation d’un mythe), et parfois quelques bribes de récits anciens. L'ère communiste, puis la révolution culturelle ont en effet fait un radical ménage, fermant les ateliers, détruisant tant bien que mal toute trace de culture ancienne, et ces familles producteurs ont péris, ou se sont enfuis à l’étranger où on a finit par perdre leur trace.
Ce « retour » des vieux producteurs historique est donc, une fois de plus, qu’une illusion vide de sens. Du passé affiché par ces galettes il n’y a qu’un nom, et malheureusement ces thés ne cherchent même pas à refléter, par leur style ou leur recettes, les grandes galettes dont ils se sont emparés de l’image…